NEWSLETTER INTERNE DU PERSONNEL
Les réponses à vos questions
L’élaboration du vaccin est très rapide. Est-ce que des
étapes ont été contournées ?
L’immunité contre les coronavirus avait beaucoup été étudiée à l’occasion des alertes précédentes. On savait donc qu’il était généralement suffisant de déclencher une réponse contre la protéine S pour obtenir une protection.
L’immunité anti-coronavirus
L’immunité contre les coronavirus avait beaucoup été étudiée à l’occasion des alertes précédentes, l’émergence du SARS-CoV en Asie et l’émergence du MERS-CoV en Arabie Saoudite. On savait donc qu’il était généralement suffisant de déclencher une réponse contre la protéine S pour obtenir une protection.
Pour le SARS-CoV-2, la séquence de la protéine S a été rendue publique par les scientifiques
chinois dès janvier 2020. La production d’ARN correspondant à cette séquence a pu se faire quasiment immédiatement, et beaucoup plus rapidement que la production de protéines ou la culture de virus.
Les essais rapidement menés chez l’animal ont confirmé qu’il était assez simple de déclencher une réponse immunitaire efficace contre le SARS-CoV-2. Cela contraste avec le fait que, par
exemple, il est très
difficile d’obtenir une réponse efficace contre l’agent du paludisme, et qu’on ne parvient toujours pas à élaborer un vaccin contre le VIH, malgré des décennies de recherche.
Les plates-formes vaccinales
Avant l’arrivée de la pandémie de Covid-19, les plateformes de vaccination de type acide
nucléique (ADN, ARN) avaient déjà été largement étudiée contre le virus Zika, le virus de la rage
et le VIH, mais aussi contre les coronavirus SARS-CoV-1 et MERS-CoV sur des modèles animaux et dans des essais cliniques de phase 1 et 2. Ce sont donc des années
de travail
gagnées sur
l’élaboration
d’un vaccin
contre le SARS-CoV-2. Elles
avaient
été identifiées
comme des approches
particulièrement
intéressantes
en cas de maladie infectieuse
émergente car elles permettent de construire très rapidement le candidat vaccin après
identification de l’agent infectieux
en cause.
Un effort scientifique
et financier sans précédent
L’existence de ces nouvelles plateformes ne permet pas de gagner de
temps sur les essais cliniques eux-mêmes, qui évaluent l’innocuité et l’efficacité des candidats vaccins ; mais dans le cadre de la pandémie, les différentes
étapes se sont très rapidement succédées dès que les
premiers résultats ont été obtenus.
Par ailleurs, sans être dégradés, les processus de vérification des vaccins ont été considérablement accélérés. Comme la FDA, l’Agence européenne des médicaments (EMA) a créé des procédures pour évaluer rapidement les vaccins en développement sans pour autant déroger à la rigueur scientifique. Par exemple, la “rolling review” consiste à analyser les données fournies par les laboratoires toutes les deux semaines, permettant de réduire la durée du processus. Quelle que soit l’approche vaccinale, les vaccins ne seront autorisés que lorsque les autorités indépendantes confirment leur qualité, leur sécurité et leur efficacité. Enfin, une force de frappe jamais égalée a été déployée en réponse à la pandémie de Covid-19 : la mobilisation des équipes de recherche et des Etats et la création de partenariats public- privé ont facilité et accéléré le développement, la fabrication (anticipation du développement industriel) et la distribution des vaccins. Le programme interinstitutionnel américain « Warp Speed » (« la vitesse de l’éclair ») a par exemple permis le financement de plusieurs entreprises pour le développement de plusieurs vaccins basés sur les nouvelles technologies. Autre exemple, « COVAX » est la partie « vaccins » d’une collaboration mondiale visant à accélérer la mise au point et la production de produits de diagnostic, de traitements et de vaccins contre la Covid-19 et à en assurer un accès équitable.
Quelle est l’efficacité des vaccins à ARNm de Pfizer-BioNTech et de Moderna ?
Les preuves d’efficacité de ces vaccins proviennent de deux vastes essais cliniques de phase 3 randomisés, en double aveugle et avec un groupe placebo, c’est-à-dire procurant le plus haut niveau de preuve scientifique. Ces deux essais (l’un de 43000 participants environ, l’autre de 30000 participants environs) montrent une efficacité de 94%. Concrètement, pour le vaccin
Pfizer-BioNTech, les résultats ont porté sur 170 cas de Covid-19 symptomatiques : 8 cas sont
survenus dans le groupe des volontaires vaccinés contre 162 cas dans
le groupe placebo ; pour le vaccin Moderna, sur 196 cas de Covid-19 symptomatiques, 11 sont survenus dans le groupe
des
volontaires vaccinés
contre 185 cas dans le groupe placebo. Cette efficacité ne variait pas
dans différentes les catégories d’âge
et de sexe, et chez les personnes souffrant de problèmes médicaux sous-jacents, ainsi que chez les participants ayant eu une infection antérieure par le SARS-CoV-2 ; d’autres résultats permettront de préciser encore davantage si cette efficacité
varie dans différents groupes de personnes.
Quels sont les effets secondaires les plus fréquents des vaccins à ARNm ?
La grande majorité
des
effets secondaires observés
lors
des essais cliniques se manifestent le
lendemain de la vaccination et durent habituellement moins de 3 jours. Ils sont classiques et
relativement attendus et fréquents : rougeur au point d’injection,
fatigue, maux de
tête, douleurs musculaires, frissons ou fièvre. C’est ce que l’on appelle la « réactogénicité ». Les effets généraux sont plus fréquents après la 2ème dose de vaccin et chez les personnes plus
jeunes. Ils sont le plus souvent légers
à modérés et durent en moyenne
2 à 3 jours. Comme pour toute autre vaccination, les personnes vaccinées doivent être averties de
la possibilité de
survenue de tels effets. La prise de paracétamol est possible, mais elle n’est pour le moment pas recommandée de manière préventive.
Notons que, dans
le groupe placebo, 23 % des sujets ayant reçu le placebo (une solution d’eau salée) ont rapporté des maux de tête (contre 59 % dans le groupe vacciné) et 23 % ont rapporté une fatigue (contre 65 % dans
le groupe vacciné) dans les 7
jours suivant la 2ème dose dans l’essai clinique de Moderna.
Notons enfin la survenue d’adénopathie(s) axillaire(s) plus fréquente(s) dans le groupe des
volontaires vaccinés (0,3 et 1,1 % dans les essais de Pfizer-BioNTech et Moderna
respectivement) que parmi ceux ayant reçu le
placebo.
Société de Pathologie Infectieuse de Langue Française
24 décembre 2020